La maîtrise de la profondeur de champ (zone de netteté) de l’image n’est pas une chose facile lorsqu’on débute la photographie. Pour y parvenir, vous avez dû vous familiariser avec des notions un peu abstraites comme l’influence des éléments suivants :
L’ouverture du diaphragme de l’objectif,
La focale utilisée,
La distance vis-à-vis du sujet.
Dans le cadre de votre apprentissage, vous avez débuté en mode automatique, laissant votre boîtier faire de son mieux pour essayer de vous apporter une photo la plus nette possible du 1er plan à l’infini. Puis vous avez exploré le mode priorité ouverture, qui vous permet de reprendre la main sur le choix de l’ouverture du diaphragme…
En progressant, vous avez entendu parler d’une vieille technique remontant au temps de l’argentique (la préhistoire 😉) : la mise au point sur l’hyperfocale.
C’est quoi ce nom barbare ? 😱
On vous a dit : laisse tomber, pour utiliser cette technique il faut encore avoir un vieil objectif argentique avec la bague de diaphragme intégrée. C’est pas pour toi avec ton boîtier hybride récent !
Vous êtes perdue(e) ? Ok, pas de soucis, on voit ça ensemble dans cet article !
Dans un premier temps, nous allons voir ce qu’est l’hyperfocale, pourquoi et comment l’utiliser. Ensuite je vous donnerai quelques conseils d’utilisation et les inconvénients de cette technique. Enfin, je vous dirai ce que je pense de son utilité avec un boîtier hybride ultramoderne !
QU’EST-CE QUE L’HYPERFOCALE, POURQUOI ET COMMENT L’UTILISER ?
Tout d’abord, qu’est-ce que l’hyperfocale ?
L'hyperfocale est la distance à laquelle la mise au point de l'objectif doit être réglée pour avoir une profondeur de champ (zone de netteté) suffisante pour que tout soit net de la moitié de cette distance jusqu’à l’infini.
L’endroit précis de mise au point est déterminant pour l'hyperfocale, car il est important de savoir où elle se situe pour obtenir la plus grande profondeur de champ possible.
Pourquoi utiliser l’hyperfocale en photo nature ?
En photo nature, l'hyperfocale est utilisée dans les situations où il est important de maximiser la profondeur de champ. Les photos de paysages doivent être nettes sur les différents plans, donc c’est ce type de photos qui est le mieux adapté à cette technique.
Le problème en photo de paysage, c’est que dès qu’un premier plan se trouve très proche, il est difficile d’avoir toute la photo nette. La zone de netteté se situe pour 1/3 devant le sujet et 2/3 derrière lui.
J’explique ça dans les 3 exemples ci-dessous :
Dans la 1ère situation, la photographe fait le choix de faire la mise au point sur le premier plan. Résultat, une grande partie de la photo est floue.
Dans la 2ème situation, la mise au point est faite à l’infini. Le 1er plan est flou.
Dans la 3ème situation, la mise au point est faite sur la distance hyperfocale. Tout est net de la moitié de cette distance jusqu’à l’infini.
Quels sont les éléments qui agissent sur l’hyperfocale ?
Pour calculer l'hyperfocale, vous devez prendre en compte trois éléments :
la distance focale de votre objectif,
l'ouverture de diaphragme choisie,
la taille du capteur de votre appareil photo.
1 - La distance focale de l’objectif.
C’est la distance exprimée en millimètres entre le centre optique de l’objectif (lieu de convergence des lentilles) et le capteur numérique de l’appareil photo.
💡 Plus la longueur focale est importante, plus la profondeur de champ est réduite. A l'inverse, plus la longueur focale est courte, plus la profondeur de champ est importante.
2 – L’ouverture de diaphragme, parmi la plage disponible de l’objectif.
Cette plage correspond à l’étendue de l’ouverture du diaphragme permise par un objectif.
💡 Plus le diaphragme peut s’ouvrir, plus la quantité de lumière qui entrera dans l’objectif sera importante et la profondeur de champ réduite.
💡 A l’inverse, plus le diaphragme sera fermé moins il laissera entrer de lumière et plus la profondeur de champ sera étendue.
Dans l’exemple ci-dessous, la plage d’ouverture du diaphragme va de F2.8 (très ouvert) à F16 (très fermé).
3 – La taille du capteur de l’appareil photo.
Un capteur plus petit que le format standard 24x36 (full frame) aura 2 effets sur l’image :
un recadrage de l’image : x1.5 (ou x1.6 pour Canon) avec le format APS-C et x2 avec le format 4/3.
une zone de netteté (profondeur de champ) plus importante.
Pour résumer ces 3 facteurs d’influence de l’hyperfocale :
Plus la distance focale est courte, plus la zone de netteté est grande, ce qui signifie que vous pouvez faire la mise au point sur un objet plus proche de l'appareil photo tout en conservant une profondeur de champ maximale.
De même, une ouverture plus petite (un nombre F/ plus grand) permettra une plus grande profondeur de champ, ce qui signifie que vous pouvez faire la mise au point sur un objet plus proche tout en conservant la netteté de l'arrière-plan.
Enfin, plus le capteur est petit, plus la profondeur de champ augmente.
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Comment calculer l’hyperfocale ?
On écarte de suite l’utilisation d’un objectif doté d’une bague de diaphragme donnant directement le repère d’hyperfocale. L’intérêt est justement d’y arrivant avec un objectif dépourvu de cette possibilité.
Je vous donne 5 méthodes pour y parvenir, de la plus compliquée à la plus simple.
Méthode # 1 : avec une formule mathématique.
(focale)2 / (ouverture x cercle de confusion)
Hyperfocale = ____________________________________
1000
Le cercle de confusion ? Késako ? C’est vrai, qu’il y a de quoi être confus ! 🤪
Wikipédia dit à ce propos : « …En photographie, le cercle de confusion (CdC) est le plus gros disque lumineux circulaire qui puisse se former sur la surface photosensible et qui sera néanmoins perçu comme un point sur le tirage final… »
Wikipédia précise : «…Pour le calcul du cercle de confusion, la plupart des tables utilisent la valeur de c = 0,030 mm comme référence en 24 × 36, en particulier pour les appareils photo numériques, ce qui correspond à c = d/1442 (d = diagonale du format)… »
Reprenons la formule avec par exemple un objectif de 50mm utilisé à l’ouverture de diaphragme F/8 et monté sur un boîtier full frame (24x36) :
(50)2 / (8 x 0,030)
Hyperfocale = ____________________________________
1000
Le résultat est : 10,42 mètres.
Vous avez mal à la tête ? Moi aussi ! Passons à une autre méthode… 😁
Méthode # 2 : avec une table d’hyperfocale.
Exemple de table d’hyperfocale.
Une table d'hyperfocale est un outil très utile pour déterminer la distance hyperfocale pour une combinaison donnée d'objectif et d'ouverture. Elle vous permettra de déterminer la distance de mise au point pour obtenir une profondeur de champ maximale.
Voici comment l’utiliser :
Repérez la distance focale de votre objectif (exemple : 24mm).
Sélectionnez l'ouverture du diaphragme (exemple : F/8) que vous souhaitez utiliser pour votre prise de vue.
Trouvez la distance hyperfocale dans la table d'hyperfocale à l’intersection de la distance focale de votre objectif et de l'ouverture de diaphragme sélectionnée (exemple : 2,40 mètre pour un 24mm à F/8).
Faites la mise au point sur la distance hyperfocale mentionnée.
Méthode # 3 : avec une application pour Smartphone.
Je vous conseille deux petites applications gratuites pour Smartphone qui feront très bien le job :
Pour aller à l’essentiel : Hyperfocale (calculateur). Vous entrez les paramètres et avez aussitôt la distance hyperfocale qui s’affiche.
Pour aller un peu plus loin : Profondeur de champ et hyperfocale. Un peu plus complexe, mais a l’avantage en plus de donner la valeur d’hyperfocale, de visualiser la profondeur de champ avec et sans utilisation de l’hyperfocale. Très pédagogique !
Méthode # 4 : Trouver l’hyperfocale en visualisant le 1er élément net de l’image.
C’est un peu empirique comme méthode, mais a l’avantage d’être très rapide.
Faites une photo en faisant le point sur l’infini.
Visualisez la photo en zoomant sur l’écran arrière pour trouver le 1er élément net à l’avant plan de l’image.
Refaites la photo en faisant le point sur ce 1er élément net à l’avant plan de l’image. Il correspond à la distance hyperfocale.
Méthode # 5 : Trouver l’hyperfocale en faisant le point sur le 1/3 inférieur de l’image.
Encore plus rapide : c’est la suite logique de la méthode 4. Le 1er élément net se trouve à peu près au niveau du 1/3 inférieur de la photo. Si vous faites la mise au point sur un élément se situant le long de la ligne rouge dans l’exemple ci-dessous, vous êtes à peu près à l’hyperfocale. Tout sera net.
💡 Astuce : utilisez le quadrillage de votre verre de visée pour repérer la ligne du 1/3 inférieur de l’image.
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Quelques conseils pour utiliser l’hyperfocale.
Voici 6 conseils pour utiliser l'hyperfocale en photo nature :
Utilisez un objectif grand-angle : Ils ont une plus grande profondeur de champ, ce qui les rend idéaux pour l'hyperfocale. Plus l'objectif est grand-angle, plus la zone de netteté sera grande.
Utilisez une petite ouverture : Pour optimiser la profondeur de champ, utilisez une petite ouverture comme F/8 ou F/11.
Faites la mise au point manuellement : Pour utiliser précisément l'hyperfocale, vous devez régler la distance de mise au point manuellement. assurez-vous que la distance de mise au point correspond à la distance hyperfocale pour votre objectif et votre ouverture.
Utilisez la table d’hyperfocale ou une application pour Smartphone : Elle vous permettra de savoir immédiatement où faire la mise au point.
Utilisez un trépied pour maximiser la netteté de l'image en stabilisant l'appareil photo.
Utilisez le mode manuel ou le mode priorité ouverture pour contrôler la profondeur de champ.
Les inconvénients de l’hyperfocale.
Bien que l'hyperfocale soit une technique utile pour obtenir une zone de netteté étendue dans une image, il existe également des inconvénients à considérer. En voici 6 :
La mise au point manuelle : L'hyperfocale nécessite une mise au point manuelle, ce qui peut être difficile à faire dans des conditions de faible luminosité pour les débutants.
Les distances de mise au point varient : Les distances de mise au point hyperfocale varient selon l'objectif et l'ouverture utilisées, ce qui signifie que vous devez régler la distance de mise au point pour chaque scène que vous photographiez.
Risque de flou de bougé : Pour obtenir une zone de netteté étendue, vous devez utiliser une petite ouverture, ce qui peut augmenter le temps d'exposition. Cela augmente également le risque de flou de bougé si vous n'utilisez pas un trépied.
La limitation de la distance de mise au point : L'hyperfocale ne fonctionne que pour les distances de mise au point au-delà d'une certaine distance. Si vous voulez faire la mise au point sur un sujet plus proche (macro), cette technique ne sera pas adaptée.
La nécessité d'un objectif grand-angle : Pour utiliser l'hyperfocale efficacement, il vaut mieux utiliser un objectif grand-angle. Vous n’obtiendrez pas de bons résultats avec un téléobjectif.
LA MISE AU POINT A L’HYPERFOCALE EST-ELLE ENCORE UTILE A l’ERE DE L’HYBRIDE ?
La première chose que l’on peut dire, c’est que les différents paramètres qui influencent l’hyperfocale (longueur focale de l’objectif, ouverture du diaphragme et taille de la surface sensible à la lumière) sont valables que le boîtier soit argentique ou numérique (reflex ou hybride).
Donc, si en photo nature vous faites du paysage avec un boîtier hybride, vous avez tout intérêt à utiliser l’hyperfocale. 😉
Mais est-ce que l’hybride apporte un plus pour utiliser l’hyperfocale ?
En fait pas directement. Il apporte un gros plus pour gérer finement l’étendue de la zone de netteté.
Avant l'hybride, on avait le bouton de test de profondeur de champ. On appuyait dessus et le viseur s’assombrissait d’un coup 😮 car le diaphragme était à l’ouverture réelle (et non à pleine ouverture comme pour la visée). Résultat, ce n’était pas toujours évident de distinguer ce qui était net et flou dans un viseur sombre… 😒
Avec l’arrivée de la technologie hybride, on y a gagné le focus peaking ! 🤩
Exemple de focus peaking sur boîtier hybride.
Les zones nettes apparaissent en rouge en mise au point manuelle.
Il suffit de tourner la bague de mise au point pour faire varier les zones rouges (nettes) et ainsi visualiser très précisément l’étendue de la profondeur de champ.
Nb. : j’ai choisi une photo sous-exposée (-1.3) utilisée lors d’un bracketing d’exposition (pour assemblage HDR), pour mieux voir les zones rouges. Désolé pour la piètre qualité de la photo d’exemple faite sous la pluie… 😬
Le focus peaking ne dispense pas d’effectuer la mise au point sur l’hyperfocale, il apporte juste un énorme confort de visualisation et de contrôle des effets produits par un changement de distance de mise au point.
CONCLUSION.
En résumé, l'hyperfocale est une technique à ne pas négliger en photographie qui permet de maximiser la profondeur de champ pour obtenir des images nettes de l'avant-plan à l'arrière-plan. En comprenant comment utiliser l'utiliser, vous pourrez obtenir de meilleurs résultats en photo de paysage.
Le passage à l’hybride n’a selon moi pas rendue la mise au point hyperfocale obsolète. La technologie hybride facilite juste simplement et très efficacement la gestion de la profondeur de champ. La combinaison hyperfocale + focus peaking est donc un duo gagnant ! 👍
A présent, à vous de jouer. Lancez-vous : l’esprit « 100% net » va vous gagner très vite ! 😁
A bientôt.
Bonnes photos. Prenez soin de vous.
Laurent DUPERIER
Photographe et formateur photo nature
Instagram : https://www.instagram.com/laurent_duperier/
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